Hypnose et bouddhisme


Hypnose, bouddhisme, et physique quantique dénoncent la notion même de causalité.


Une cause, une conséquence. Toute chose a une cause, et il ne peut y avoir une chaîne infinie de causes. Cet enchaînement des causes est un des arguments les plus fréquemment utilisés pour démontrer l’existence de Dieu, de Platon à Kant en passant par Saint Thomas d’Aquin. Tôt ou tard, on doit aboutir à une cause première. Ainsi, Dieu serait responsable de tous les contenus de l’univers.

Aujourd’hui, la notion de flou quantique démontre que les relations causales et le déterminisme ne sont plus de mise. Le flou quantique permet au temps et à l’espace, puis à l’univers, à partir du Big Bang, de surgir spontanément du vide. 4

Si le bouddhisme place ce moment sans cause dans ce qu’il appelle Claire Conscience, il propose, dans l’univers quotidien que David Bohm appelle ordre déplié, l’absence d’une cause unique.

 La « co-production conditionnée » explique que rien n’est sans cause, et rien n’est sa propre cause. Chaque chose se produit suite à un concours de conditions. La graine ne pourrait pas mener au fruit sans d’autres conditions nécessaires : la pluie, le sol fertile, l’ensoleillement, les abeilles butineuses…

« Si un élément manque, le fruit peut ne pas survenir. La condition nécessaire n’est pas forcément la première, mais celle « juste avant », la précédente. Les conditions multiples changent à chaque instant.

Si rien n’est sans cause et rien n’est sa propre cause, il s’avère que ceci est, parce que cela est. C’est ce que l’on appelle « la Voie du Milieu ». Ceci apparaît parce que cela apparaît. Parce que l’ignorance existe, la formation existe. Parce que la formation existe, la conscience existe. Parce que la conscience existe, le corps et l’esprit existent. Parce que le corps et l’esprit existent, les six organes des sens existent. Parce que les six organes des sens existent, le contact existe. Parce que le contact existe, la sensation existe. Parce que la sensation existe, le désir existe. Parce que le désir existe, la saisie existe. Parce que la saisie existe, le devenir existe. Parce que le devenir existe, la naissance existe. Parce que la naissance existe, la vieillesse et la mort existent, et ainsi la souffrance s’accumule en une masse énorme. Mais avec l’extinction de l’ignorance, la formation cesse.

Avec la disparition de la formation, la conscience cesse. Sans conscience, le corps et l’esprit cessent. Sans corps et esprit, les six organes des sens cessent. Sans organes sensoriels, le contact cesse. Sans contact, la sensation n’existe plus. Sans sensation, il n’y a plus de désir. Sans désir, plus de saisie. Sans saisie, le devenir cesse. Sans devenir, la naissance cesse. Sans naissance, la vieillesse et la mort cessent, et finalement, la masse entière de la souffrance s’éteint. » 5

Dépendre d’une suite d’événement, et n’en pas dépendre. Ne pas croire simplement qu’il n’y aurait des impies que parce qu’il y a des croyants. Que le pile du milliard d’affamés sur la planète coïnciderait avec le face du milliard qui se plaint d’être en surpoids. Que dans cette possible nécessité de complétude, la masse « d’imbéciles » serait identique à celle des « savants », celle des constructeurs que celle des destructeurs. Qu’un équilibre en dépendrait.

Au-delà du bouddhisme, la physique quantique apprend à pouvoir être dans plusieurs états alternativement et en même temps. Il peut y avoir une linéarité, et une non-linéarité.

Le travail de thérapie, et du choix d’être bien, est de changer les conditions du regard : d’inscrire une nouvelle vue, la Vue Juste, même si elle est fausse.

« La souffrance se manifeste lorsque les conditions favorables sont réunies, et elle disparaîtra lorsque les conditions ne seront plus favorables » disait déjà le Bouddha. « Lorsqu’une personne à la Vue Juste observe la manifestation du monde, elle ne le voit pas comme non-existant. Ayant la Vue Juste, quand elle observe la dissolution du monde, elle ne le voit pas comme existant. S’attacher à l’être est une vue extrême, et s’attacher au non-être est une autre vue extrême. »


 

Vers une vacuité pleine

 

La vacuité pleine, exemple d’oxymore, fait le lien entre physique quantique et vacuité bouddhiste, explique le Dalaï-lama. « L'une des plus importantes idées philosophiques du bouddhisme est la théorie de la vacuité.

Au cœur de cette notion réside la reconnaissance profonde qu'il existe une disparité fondamentale entre notre manière de percevoir le monde, y compris notre propre existence en son sein, et la manière dont les choses sont véritablement.

 Dans notre expérience quotidienne, nous avons tendance à nous relier au monde et à nous-mêmes comme si ces entités possédaient une réalité close, définissable, distincte et durable. Par exemple, si nous examinons notre propre conception du soi, nous découvrons que nous avons tendance à croire que notre être possède un noyau essentiel qui donne à notre individualité et à notre identité le caractère d'un ego distinct, indépendant des éléments physiques et mentaux qui constituent notre existence. La philosophie de la vacuité révèle que c'est non seulement une erreur fondamentale, mais également la base de l'attachement, du besoin d'appropriation et du développement de nos nombreux préjugés.

Selon la théorie de la vacuité, toute croyance en une réalité objective fondée sur l'hypothèse d'une existence intrinsèque, indépendante, est fausse. Toutes les choses et tous les événements, qu'ils soient des concepts matériels, mentaux ou même abstraits, tel le temps, sont dénués d'existence objective, indépendante.

Posséder ainsi une existence indépendante, intrinsèque impliquerait que les choses et les événements sont en quelque sorte « complets » et par conséquent entièrement indépendants. Cela signifierait qu'ils ne peuvent pas interagir et que rien n'a d'influence sur eux. Or nous savons qu'il y a cause et effet – tournez une clé dans un démarreur, les bougies s'allument, le moteur tourne et l'essence et l'huile brûlent. Dans un univers de choses indépendantes existant en soi, ces événements n'arriveraient jamais. Je ne pourrais pas écrire sur du papier et vous ne pourriez pas lire les mots sur la page.

Donc nous interagissons et nous modifions mutuellement il nous faut supposer que nous ne sommes pas indépendants, quelle que soit notre impression ou notre intuition du contraire.

Effectivement, la notion d'existence intrinsèque, indépendante est incompatible avec la causalité. La causalité implique la contingence et la dépendance. Quoi que ce soit possédant une existence indépendante serait immuable et clos. Tout est composé d'événements interdépendants, de phénomènes en interaction continuelle sans essence fixe ou immuable, entretenant des relations dynamiques constamment changeantes. L

es choses et événements sont « vides » en ce qu'ils ne possèdent pas d'essence immuable, de réalité intrinsèque ou d’« être » absolu conférant l'indépendance. Les textes bouddhiques nomment cette vérité fondamentale sur « la manière dont les choses sont réellement » « vacuité », ou shunyata en sanscrit. »

 (Dalaï-lama, « Tout l’univers dans un atome, Science et bouddhisme, une invitation au dialogue », Robert Laffont, 2006)